lundi 30 novembre 2009

Vendredi 13



Sur le carton, une phrase du genre « Monsieur le Premier ministre vous prie de bien vouloir assister à la réception qu’il donnera en l’honneur de la communauté française à l’occasion de sa visite à Ho Chi Minh ville ». J’étais trop curieux pour manquer cela. La dernière visite officielle de ce genre remonte à la venue de Chirac en 2004. Aujourd’hui, elle est motivée par des raisons économiques. Il s’agit pour la France de tirer des avantages de la forte croissance vietnamienne en concluant des marchés sur les transports publics, le nucléaire civil et l’aéronautique. Pour faire bonne figure auprès de ses interlocuteurs, François Fillon n’a pas ménagé ses efforts : il est allé jusqu’à s’incliner sur la dépouille de Ho Chi Minh à Hanoi !


Mais, pragmatique, le chef du gouvernement en a aussi profité pour tenter de faire revenir au bercail les brebis égarées de la communauté française en dissertant longuement sur le bilan de son gouvernement lors de son allocution dans les jardins du consulat. Après quelques banalités d’usage sur l’utilité de son voyage au Vietnam, il lâcha ses notes, tout d’abord pour tacler Jospin qui l’avait traité la veille « d’inélégant, impertinent et imprudent », puis, ensuite, pour se gargariser de compliments sur son action - tout en ayant pris le soin au préalable de se défendre de toute forme d’auto satisfecit (« qui serait déplacé »). Dans ses envolées, il se perdit un peu quand même, en indiquant, que le bilan de son gouvernement sera à faire « dans 5 ans ».


Survint le moment le plus pathétique de la soirée, à la fin du discours : La Marseillaise - que l’assistance s’ingénia à ne pas chanter pour laisser la délégation française en tribune dans un grand moment de solitude.
Sur l’estrade, une personnalité tente de dissimuler qu’elle répond à un appel sur son portable, tandis qu’un ministre (...celui des transports, précsion inutile car vous ignorez qui c'est...) s’éponge le front avec un mouchoir. C’est vrai qu’il fait chaud et qu’il commence à faire soif...

Brèves de comptoir
Autour du buffet, plus tard :
« Une partie de la délégation, avec les chefs d’entreprises venus de France est restée bloquée à Hanoi, je suis venu les poches remplies de cartes de visite mais il n’y a personne... »
« Il devait y avoir du fromage et de la charcuterie venue de France, mais, tout ça c’était dans l’avion qui est resté à Hanoi »
« On veut vendre des Airbus ? Mon cul ! On est venu avec un Airbus qui n’est même pas capable de décoller... ».

Un autre, un peu faux cul, une coupe de champagne à la main raconte à quelqu'un surpris de le rencontrer :
«  Ouais... Finalement je suis venus, je me suis décidé sur un coup de tête ».
Enfin, comme à chaque réception, pour rendre l'ambiance chaleureuse, une compilation de Barbara gémit en fond sonore. De nouveaux CD étaient-ils dans l’avion qui n’est jamais arrivé ?

Fillon, lui part discrètement. Dans l’assistance, on murmure qu’il va dormir sur une jonque à Hué...




dimanche 8 novembre 2009

Le mur et la mire

Entre 30 minutes et 3 heures de différé. Impossible de comprendre quoique ce soit aux programmes de TV5 monde depuis le mois d’aout. Justification avancée : les autorités vietnamiennes bloquent les programmes afin de pour mieux pouvoir les contrôler - c'est-à-dire de les censurer. On avait déjà remarqué depuis longtemps ce filtrage (coupures inopinées des films pendant des scènes érotiques, par exemple), mais là, le contrôle s'est sensiblement durci. Tout film, tout documentaire est systématiquement interrompu dès qu’il parle du Vietnam : allusions à la guerre, aux mœurs, tout passe à la trappe, même les reportages évoquant avec compassion des intempéries meurtrières ( "Non, non, il n'y pas de morts, le Parti gère toutes les situations délicates avec succès, vraiment, le Vietnam, c'est le pays du bonheur !")
Naturellement, ces derniers jours, TV5 a prévu la diffusion de plusieurs documentaires sur la chute du mur de Berlin dont nous célébrons le 20ème anniversaire. Ce n’est pas vraiment le Vietnam qui est au cœur du sujet, mais la sanction est la même. Voir se faire déboulonner les statues de Lénine, ça ferait désordre. Par conséquent, nous avons souvent le droit à la mire en ce moment, ou, pire, des dessins animés - genre "y a pas de censure" ( la mire, ça fait trop douter...). Comble de ce déni d’histoire, une grossière manœuvre de diversion à été orchestrée par voie d’affichage dans les rues : La célébration du 92ème anniversaire de la révolution d’octobre (7 novembre 1917) ! Répétez après moi : « Vive Lénine !»

"Commémoration de la révolution russe d'octobre"


Fin de séjour




2 novembre
Il fait froid comme promis, mais il y a un grand soleil. Nous décidons de marcher à bon rythme dans les quartiers que nous avons encore délaissés. Impossible de tout faire ici…Et notre séjour touche à sa fin. A mesure que nous avançons, le froid s’adoucit et la neige commence à fondre. Nous visitons quelques temples au hasard des hutongs, à l’heure du marché.


Sur les bords du lac Beihai , des personnes âgées prennent un cours de danse en plein air. Nous montons sur la colline de charbon pour regarder une dernière fois la cité interdite. A perte de vue, des immeubles dont celui de la télé chinoise que nous avions repéré la veille sur la route en revenant de la muraille de Chine. Un édifice incroyable. Juste à côté une tour de 146m de haut qui a entièrement pris feu au moi de février dernier alors qu’elle était en construction.
Dans la soirée, le froid est plus rude et a tué nos velléités de sortie. C’est l’occasion de réviser les dynasties chinoises, de les situer dans le temps. Les Tang, les Yuan, les Ming… Tous ces noms qu’on connaît plus ou moins, auxquels on s’intéresse le temps d’un voyage. On se jure même qu’on lira des essais historiques sur ces dynasties, résolution, que, dans les faits, on ne concrétise jamais- ou presque. Des connaissances qui ne resterons pour la plupart qu’éphémères… Quel gâchis…


3 novembre
Nous refermons les valises. Dernière matinée. Nous faisons la visite du temple des Lamas, haut lieu de culte pour les bouddhistes tibétains. Ce temple renferme une étonnante statue de Bouddha sculptée d’un bloc dans un tronc de santal blanc. Elle mesure 26 mètre de haut, et 8 de large ! C’est la plus grande statue en bois de Bouddha dans le monde.
Puis enfin, dernier voyage en métro vers l’aéroport. Le nom de certaines stations nous sont désormais familiers : Zhangzi Zhonglu, Dongzhimen, Dongsi, Dongdan Wangfujing…Nous mangeons un dernier yaourt comme on en trouve ici, dans un pot en terre, fermé par un papier bleu et blanc maintenu par un élastique que l’on perce avec une paille…Mais, le cœur n’y est plus, il faut rentrer.

Du Palais d'été à la muraille

31 Octobre
Pékin il y 10 ans c’était sûrement très bien. Il y a toujours beaucoup de nostalgie quand certains évoquent le développement des grandes villes asiatiques. Aujourd’hui s’achèvent à Pékin des équipements programmés avec les Jeux Olympiques de 2008 et désormais nous pouvons –n’en déplaisent au guides touristiques- aller au Palais d’Eté en métro, ce qui est bien pratique. Sur place, nous sommes particulièrement charmés par la petite Venise chinoise reconstituée sur un canal afin de distraire les empereurs à qui il n’était pas permis de se rendre en ville.

A la suite de cette visite, nous faisons un arrêt en chemin pour faire une petite promenade du côté du Nid d’Oiseau et du Cube d’eau. On les avait tant vu à la télé, avec leurs héros plus ou moins heureux : Bolt, Manaudou, Phelps, Liu Xiang...
De nombreux promeneurs sont avec nous, et se font prendre en photos devant ces lieux à l’architecture remarquable. Par des hauts parleurs, une voix féminine matraque entre deux chansons douces ce que j’imagine être de la propagande pour rappeler la réussite de l’organisation des JO et les résultats éclatants de la délégation chinoise.

Comme il fait beau et que nous sommes encore en forme, nous poursuivons notre journée par la visite de la rue de la soie, un marché dont l’intérêt touristique est souvent évoqué dans les brochures touristiques. Cet intérêt nous a échappé : Produits peu attrayants, chers et racolage agressif…

1er Novembre
Dans le minibus, la guide nous parle de Pékin, de ses 4 millions de véhicules, des ses 1000 immatriculations nouvelles chaque jour. C’est la première personne que nous rencontrons qui parle bien anglais. Elle nous raconte qu’elle est très chouchoutée par ses parents car elle est leur troisième fille, née juste une semaine avant l’application de la loi punissant d’une amende de 10 000 euros les familles ayant plus de deux enfants… Dehors, il neige. C’est la surprise de cette matinée. Ce dimanche, nous roulons avec un groupe d’une dizaine de personnes vers la grande muraille de Chine. Avant le départ nous avons du acheter au pied levé des bonnets, des gants et un blouson pour Stéphanie, qui ne voulait pas abîmer son manteau de velours.
Nous gagnerons, dans ces circonstances singulières en photogénie ce que nous perdrons en mobilité. Il ne sera pas possible de marcher sur une dizaine de kilomètres sur la muraille comme nous l’avions envisagé. Mais, contrairement, à ce qu’on imaginait, il n’y a pas grand monde sur le site. Cette muraille est vraiment impressionnante. Démesurée et dérisoire en même temps. Avec la neige, autour de nous, le paysage est apocalyptique, comme si nous étions sous des cendres. On ne reste alors comme ça, à regarder, immobiles, les lacets de cette muraille dans les montagnes, émerveillés…
Intempestivement, me revient en mémoire un souvenir d’enfance : la publicité de la Citroën Visa. Vous en vous souvenez ? « Révolutionnaire ! ». (Pardon pour cette digression).
Retour dans le bus. La guide nous annonce que nous sommes très chanceux car nous allons visiter un centre de médecine traditionnelle chinoise et que nous bénéficierons gratuitement d’un massage des pieds de 40 minutes. Louche…. Nous sommes conduits au premier étage d’un immeuble où l’on nous installe dans une salle nous chauffée pour un bain de pied. Un type en blouse blanche nous fait alors un exposé sur la médecine traditionnelle chinoise. On a bien sûr compris qu’il avait un truc à vendre. (Pas bête le coup du bain de pieds pour qu’on écoute docilement !). Il nous explique qu’il peut faire le diagnostique très précis d’un patient en prenant son pouls avec trois doigts au deux bras. Il propose alors de faire un diagnostique aux gens présents. Nous refusons assez sèchement. Deux personnes du groupe acceptent néanmoins. Évidemment ce charlatan décèle des problèmes de digestion à l’un, des problèmes de dos à l’autre et leur sort la carte de ses remèdes en précisant: « Vous pouvez payez par carte bancaire ». Pendant ce temps, on nous effectue en effet les massages des pieds. Vingt minutes plus tard un autre type frappe à la porte en baragouinant deux trois mots. Les masseurs se lèvent alors : « Finish now ». La guide intervient « N’oubliez pas de donner un petit pourboire ».

De retour à l’hôtel les nouvelles de la météo ne pas rassurantes pour le lendemain. On nous parle de températures autour de -7°C !


A notre retour, nous avons appris que cette neige a été provoquée par les météorologues chinois en envoyant 400 fusées de sulfate d’argent. La région souffrant de la sécheresse, dès que les conditions de températures s’y prêtent, ils n’hésitent pas à provoquer des précipitations de ce type, mais cela reste assez rare à ce moment de l’année !

Cité interdite


29 Octobre
Matinée douce mais brumeuse, le soleil a du mal à percer. Sac au dos nous partons pour une marche dans les hutongs. Ces quartiers anciens sont occupés par des maisons traditionnelles chinoises, souvent construites en briques grises, ce qui leur donne un côté très minéral. Seuls les arbres et les encadrements de portes donnent un peu de couleurs à ces rues. Nous tournons ainsi autour de la tour de l’horloge, la tour du tambour et du lac Qianhai, tout proche. Le calme, le silence qui règne durant notre promenade est surprenant, en tout cas peu en rapport avec ce que nous pension trouver dans une ville gigantesque comme Pékin ou nous nous attendions à plus de densité, plus de promiscuité. De temps en temps une femme passe en vélo pour ramasser des cartons. Au coins d’une rue il y un tas de poireaux et de choux où viennent s’approvisionner des clients. Dans les grandes artères, la circulation est assez bien régulée et fluide, beaucoup circulent en vélos électriques. Les motos taxis sont équipées de petites cabines, un peu comme des tuks tuks.
Dans les commerces : des pommes géantes, grosses comme des pamplemousses ; des images d’Obama avec une casquette avec la mention « Oba-Mao ».

30 Octobre
C’est vraiment comme au château de Versailles. Impossible de faire autrement que de visiter entre les groupes. Nous sommes à la Cité Interdite. Entre les casquettes jaunes, les casquettes rouges et noires et les casquettes bleues et blanches, nous nous frayons un chemin pour prendre nos tickets d’entrée. Ces groupes sont, semble-t-il, chinois, les personnes sont plutôt âgées. Il n’y a quasiment pas de touristes occidentaux. Ceux-ci sont peut-être allés vers des destinations plus ensoleillées. Ils n’ont pas tort ; aujourd’hui, il fait froid. Pourtant, la saison est l’une des meilleures pour visiter le nord de la Chine.




Dans les boutiques de souvenir, un produit phare est en vente : la cassette du défilé du 60ème anniversaire de la Chine Pop’. Encore une fois je regarde -entre autres- les images de ces femmes en tailleur rose et chaussées de bottes blanches qui défilent la tête haute et l’air fier, le fusil mitrailleur collé à la poitrine. Fascinant…


Fascinant aussi la visite de la Cité Interdite. Dommage tout de même qu’elle se limite au seul aperçu extérieur des palais.







L'automne de Pékin

28 octobre

Sur des centaines de mètres nous parcourrons après l’atterrissage les longs couloirs déserts du terminal 2 de l’aéroport de Pékin. A travers les vitres, les pistes se perdent à l’horizon, immenses. Le changement d’échelle est déjà palpable. Dans le bus, d’autres impressions sur cette Chine que nous découvrons émergent : ici, le soleil est bas, il y a de la brume, l’autoroute de 2 fois 3 voies est bordée d’arbres dont certains brunissent, signe d’un automne que nous n’avons plus connu depuis 3 ans. Cet avant goût serait plutôt rassurant si nous n’étions pas victimes d’un violent rappel à l’ordre en descendant du bus. Deux taxis refusent de nous prendre pour nous conduire à l’auberge de jeunesse que nous avons réservée, sans doute parce que la course à faire est trop courte… Puis le troisième enfin qui nous demande un prix 10 fois supérieur au prix réel. Nous acceptons, fatigués et pressés de poser nos bagages ; puis regrettons aussitôt… A 3h30, il a fallu se lever. Avec les offres de dernières minutes, on ne choisi pas vraiment l’heure du départ… Qu’importe. Pour le prix d’un Paris- Londres en Eurostar, nous avons eut notre billet SGN-PEK.

Les valises posées, il est 16h30 et nous prenons tout de suite le métro avec une idée en tête -vous l’avez devinée: filer vers la place Tian’Anmen, symbole de Pékin, avec son portrait de Mao.
La nuit tombe et la circulation est bloquée. Des militaires, au pas cadencé, balancement des bras ample, déboulent pour descendre le drapeau qui flotte sous le regard du grand timonier. La foule est assez nombreuse pour assister à ce cérémonial. En toile de fond, sur des écrans géants, repassent les images du défilé du 60ème anniversaire de la Chine Populaire. Mais l’exaltation de la fierté nationale sera brutalement interrompue. Les couleurs baissées, la police dispersera la foule en faisant foncer vers celle-ci des camions munis de gyrophares et de porte-voix puissants… Plutôt menaçant…La technique est bien sur efficace et la foule se dirige vers le métro, ou, va faire la queue devant les stations de bus. (Tiens ! ils font donc la queue ?) Pour nous, ce sera encore une fois le métro. Ce dernier est très moderne, et n’a rien à envier à celui de Singapour, pourtant un modèle en la matière de transport urbain. Toutefois, une précaution supplémentaire à Pékin : il faut passer ses sacs dans un scanner, comme à l’aéroport !

Pour notre première soirée, nous allons à la « rue des fantômes » pour dîner dans un petit restaurant un peu à l’écart, dans une de ce vieilles ruelles que l’on appelle ici hutongs.
Nous ne pouvons pas faire mieux que de choisir au hasard, le menu n’est qu’en caractères chinois et les serveurs n’ont pas l’air de connaître grand-chose en anglais… Que du noich!

On nous sert des coquillages et du poisson baignant dans une sauce pimentée assez grasse. On nous sert également des glaçons verts avec le plat. Apparemment, il faut manger un peu du plat puis croquer dans un glaçon, sans doute pour apaiser son caractère très épicé. Intéressant, quoique nous ne ressortions pas convaincu par le coup du glaçon.