Dimanche 27/11/2013
5h. Réveil et réveil du gardien qui, au rez de chaussée, doit
m’ouvrir. Pleine nuit, pleins phares, c’est parti pour le Bokor ! Au bout
de 10 km, au pied de l’ascension, me voici rejoint par 4 motards, dont certains
portent des vestes de survêtement « Cambodia ». Je les suis dans le
brouillard de plus en plus épais, bien content d’avoir pensé à enfiler mon
poncho « sac poubelle ». La lumière s’éclaircit, mais mon niveau
d’essence, décline de façon inquiétante dans cette montée. Dans le rouge,
j’accélère, ce qui est absurde puisque cela me fait consommer plus. Il reste
encore plus de 20 km à faire…
Finalement, au lever du jour, nous arrivons au Thansur Bokor Hotel & Casino qui organise cette course. Je retire mon dossard, une puce est prévue
pour le chronométrage ; l’événement semble bien préparé !
En attendant le départ, je fais un petit
tour dans le lobby du casino-hôtel, bien kitsch, digne de Macao. A 7 heures,
les parieurs sont déjà sur les tables de jeux, dans une ambiance sordide où les
croupières en talons aiguille portent des minijupes si courtes qu’elles
marchent les mains croisées sur les fesses pour faire écran ! Au milieu de
la principale salle de jeu, sur la moquette rouge, une Honda est à
gagner !
7h30. Les coureurs se pressent sur la
ligne de départ. Je jauge le niveau des autres compétiteurs à leurs tenues,
leurs chaussures, aux galbes de leurs jambes. Nous sommes une bonne quarantaine,
avec une bonne moitié de cambodgiens qui ne savent peut-être pas trop dans
quelle galère ils se sont embarqués : bermuda, chemisette burberry’s,
pieds nus dans leurs chaussures à semelles de 5 mm pour les uns, tenue de foot
et crampons moulés pour d’autres, sans parler de ceux qui se présentent sans
chaussures !
Tout le monde est chaud, les
organisateurs avaient organisé un échauffement en improvisant une piste de
danse et en mettant Gangnam style à fond ; ambiance garantie !
3, 2, 1 c’est parti ! Les plus mal
chaussés se jettent avec furie aux avant-postes, confirmant à mes yeux leur
manque de lucidité sur l’effort à fournir. Je les rattrape et les laisse derrière moi au 3ème
kilomètre. Je boucle finalement mon affaire en 1h 45, finissant 11ème.
Les deux premiers sont justement les deux cambodgiens croisés hier. Ils
décrochent la même médaille que moi, en plus grosse. Le nom du vainqueur :
Hem Bunting. Un champion aguerri qui participa à deux championnats du monde
d’athlétisme et qui fut le porte-drapeau de la délégation cambodgienne aux Jeux
Olympiques de Pékin, où il disputa le marathon ! La classe mondiale
quoi !
Suite du programme sur le Bokor après la
course : la visite de la vieille église, aperçue sur le parcours du semi-marathon.
Au milieu des éléments minéraux et de la végétation, elle ressemble à une
petite église de Toscane. Sur un promontoire, un improbable groupe venu d’on ne
sait où chante des airs negro spiritual. Autour d’eux, le brouillard épais fait
écran au panorama sur forêt en contre bas.
Non loin de là, l’épave du Bokor Palace
impose sa silhouette art déco. Par rapport aux photos que je lui connaissais,
il a été gratté et enduit. Il ressemble désormais à un chantier interrompu par
la crise économique. Son pouvoir d’évocation a perdu en force, c’est dommage.
Après un repas bien mérité au buffet du
Thansur Hotel-Casino, pour 9$, ce qui n’est pas cher mais qui ne vaut pas plus,
j’entreprends le retour vers Kampot inquiet à propos de mon niveau d’essence,
n’ayant pas aperçu de station-service proche. Je rentre, contrarié au point de
descendre les côtes en coupant le moteur jusqu’au monumental Bouddha situé à 10km en contrebas et au pied duquel
des vendeuses me fourniront, à un prix exorbitant, 1L d’essence conditionnée,
comme le veut la tradition, dans une bouteille d’episcopal.
Je vagabonde alors autour de quelques
villas proches abandonnées, dont l’une aurait appartenu, encore une fois, à Sihanouk.
Avec leurs terrasses panoramiques elles ont un petit air méditerranéen quand chantent,
comme c’est les cas ce jour-là, les cigales, au milieu de la pinède et des
cactus !
Le cerveau bien oxygéné, je repars
euphorique regrettant presque d’avoir trouvé de l’essence - ma curiosité
n’étant plus piquée de savoir si j’avais pu descendre le plateau et atteindre
la station Sokimex au pied du Bokor sans avoir à pousser la moto !