lundi 30 décembre 2013

Go Vap



Entre Noël et le jour de l’an, certains optent pour la mer, ou l’étranger. J’ai voulu voir Go Vap et j’ai vu Go Vap.
Go Vap, ce quartier de Saigon au nom de boîte de nuit est celui que tout voyageur découvre en premier lorsque son avion vient se poser sur l’aéroport Tan Son Nhat. A priori, un quartier sous les trajectoires des avions, c’est pas très glamour, pas très touristique.
C’est pour cela qu’il fallait que j’y aille. Cette idée a germé en moi depuis de nombreuses années. C’est un ancien collègue, qui, lors d’un repas au Pho 2000 de la rue Le Thanh Ton – à l’époque, nous travaillions sur Hai Ba Trung- avait piqué ma curiosité en me racontant qu’il y allait prendre en photos les avions. Puis, la vision de la photo de la couverture d’un livre (le Vietnam contemporain, une publication très intéressante de l’Irasec) redoubla mon intérêt : je voulais moi aussi réussir mon cliché de l’avion rasant les maisons à l’heure où l’on mange la soupe.


La mission est délicate. Avec un appareil photo de qualité moyenne, et une mauvaise connaissance du terrain, il faut consacrer beaucoup de temps à cette chasse. Les avions ne sont pas si fréquents à se poser sur Tan Son Nhat (ils se font parfois attendre 20 minutes !) et ce n’est qu’après un certain nombre de passages que l’on peut repérer les bons axes pour les prises de vues.

Errant dans les rues avec mon appareil photo, entre clubs de billard douteux et marchandes de fruits, des regards inquisiteurs se sont tournés vers moi dans certaines ruelles. «Toi chi muon chup hinh may bay !» «  Je veux juste prendre en photo les avions !». Ayant rassuré mon petit monde, la conversation s’est engagée avec un prof de sport parlant bien anglais, puis avec un jeune étudiant revenant de Singapour. Quelques avions passent, mais c’est très furtif. Le bruit annonciateur vient tardivement et ne laisse pas le temps de se préparer lorsque l’on est distrait. Puis, en deux secondes, l’avion, à cette basse altitude, entre et ressort du champ de l’appareil.
Le prof de sport me dit que c’est fatiguant ce bruit. Il doit avoir bien raison, mais, pour être franc, je m’attendais à pire. Le bruit est très court, bien plus court que celui d’un train…
Pour ce qui concerne mes photos, je ne suis pas très satisfait. J’en avais une excellente que j’ai malencontreusement effacée, je retenterai ma chance un autre jour…
 

 
 
 
 
 

dimanche 29 décembre 2013

Christophe a toujours un succès fou


Christophe est venu au Vietnam pour un concert exceptionnel au théâtre Hoa Binh le 23 novembre 2013. Pour la première fois, avec ce statut de star dont les chansons ont fait vibrer tous les karaokés de Saigon,  il  est venu rencontrer un public qui ne l’a jamais oublié. Quel  taxi, quel café n’a pas un jour pour, ses clients, lancé la cassette  où s’enchaînent « Aline », « Oh mon amour », « Main dans la main » ?

Récit de ce grand moment :

Elvis Phuong, vedette insubmersible, ouvre le concert. Pour ceux qui ne le connaissent pas, il faut reconnaître en lui une star qui après avoir adapté en vietnamien  l’héritage musical de Woodstock(*), a pris prudemment le virage de la réunification en se recentrant sur la chanson sentimentale. Après quelques mots en vietnamien, puis dans un français parfait où il témoigne, de façon émouvante, son admiration pour Christophe , il chauffe la salle avec deux titres vintage interprétés magistralement ( « Si l’amour existe encore » de J-F Michael ; « Et maintenant » de Bécaud).
C’est ensuite au tour de la jeune Dong Lan de chanter Piaf, plus ou moins en yaourt. Le  facétieux Michel Drucker asiatique qui anime cette soirée qui ressemble à un « Champs Elysées » glisse qu’elle ressemble à un moineau (+ traduction du jeu de mot en vietnamien). Ah ! Ah ! Ah !
Ensuite, My Linh enchaine sur du Céline Dion. Ça se gâte un peu… Pause et,  enfin, Christophe.


Lunettes noires, bottes beiges. Seul au piano. Christophe entame son récital petit bras et petite voix... Quelques titres un peu oubliés, des histoires de loosers pathétiques.
 
Minuit
Minuit boul´vard
Le parfum d´une femme
Une star me fait du charme
En habit blanc et noir
En habit de cauchemar
En habit corbillard

Moi, beau joueur, je drague au ralenti
La dame blanche d´insomnie
Elle me parle d´amour comme un discours
Me dit le prix de son délire

Minuit
Minuit rencard
J´ai pigé, c´est raté!
Les draps roses et le caviar
Elle ne vise que la monnaie

Comme les héros de ses chansons, le chanteur devient lui-même pathétique d’ailleurs… Il semble fatigué, quelques fausses notes sont accrochées… Mais, l’émotion. « Les paradis perdus », « les mots bleus », « Les marionnettes ».  L’émotion est de plus en plus intense. « Avec les filles j’ai un succès fou, wou wou ou… »

Il est toujours seul sur scène après une douzaine de chansons.

Puis, il manque de tomber en montant sur une estrade pour se placer derrière un synthétiseur. Spot rouge derrière lui, fumées. Il manipule un sampler, façon Jean Michel Jarre, mais version métro parisien ; trois nouvelles chansons aux ambiances étranges. (« La petite fille du troisième »)

Puis, il passe à la guitare. Petit problème technique avec l’amplification. Petit speech improvisé un verre d’eau  et trois nouvelles chansons. 

Puis, le point d’orgue de la soirée, avec les musiciens vietnamiens d’un petit orchestre comme on en voit dans les mariages ou les paquebots  avec leurs  trompettes et violons  bontempi.

« Oh mon amour ! » « Main dans la main ». Le public vibre pour de bon avec  les ces romances. Des cris entre deux chansons : « Aline ! Aline ! ». Christophe répond « On a le temps ! ».

Puis « Aline ». Les mains en l’air tendent les lueurs, non pas des briquets, mais des smartphones qui immortalisent l’instant.

Retour au piano avec harmonica et retour aux choses graves :


Au fond d'un couloir une femme nue me regarde
Elle crie : "Love, love, love, love, love, love"
Un flash au néon éclaire un homme qui se farde
Il crie : "Love, love, love, love, love, love"
Mes mains se cachent dans mes poches
J'ai froid, j'ai peur, la fin est proche.
 

Quelque chansons encore pour finir en beauté, « Cam on, cam on Hô Chi Minh, Xin Chao Hô chi Minh ! » finit de déclamer l’artiste revenu tout seul au piano sur une scène replongée dans le noir.

Standing Ovation !

 
Petit débriefing entre amis autour d’un verre en ville. Retour vers 1h en moto. Sur Hai Ba Trung, au Niveau du Park Hyatt, Christophe réapparaît sous nos yeux à l’arrière d’un taxi stationné... Nous marquons l’arrêt pour l’interpeler et lui dire merci en l’applaudissant. 

Puis, par un hasard fou en écoutant une émission  de radio en podcast le dimanche soir. La voix de Christophe revient dans mes oreilles sur un titre aux tonalités de Air :

                  Dans la pièce un sofa blanc,  cette douceur, du velours et toi… 
                  Comme l’objet de ta valeur, attrape cœur, je me fais voleur… 

Un morceau récemment enregistré avec Cascadeur, « collector ». Ca y est je suis fan de Christophe !


(*) Ne pas manquer d’écouter Elvis Phuong dans l’album :


 

 

Borobudur


Borobudur et ses alentours.

Comme Prambanan, Borobudur a dû subir de nombreuses restaurations pour ne pas s’écrouler comme un château de carte.

Comme à Prambanan, nous somme autant un objet de curiosité pour les indonésiens que les pierres elles-mêmes.

 








Après les pierres, nous ferons de belles ballades en moto dans la campagne pleine de charme qui entoure Borobudur.
 
 

 


 
Le retour en avion restera un bon souvenir. A défaut de pouvoir survoler Borobudur, nous survolons Jakarta. De façon limpide, son plan se dessine sous nos yeux avec son immense place Mederka. En mer, quelques îles ressemblent à des atolls. Puis, survolant le détroit de la Sonde  nous atteignons les côtes de Sumatra que nous longeons jusqu’au détroit de Malacca. De grands fleuves dessinés du ciel comme des serpents déversent leurs eaux saumâtres couleur café au lait dans la mer bleue tandis que les portes containers travaillent comme des fourmis.
De nuit, en repartant de Kuala Lumpur, les tours Petronas illuminées et scintillantes nous offrirons une dernière image spectaculaire, pleine d'étoiles.
 
 
 

Prambanan


25 avril
 
De loin, on dirait Angkor Wat, avec des pierres plus grises, plus carrées. Prambanan est le plus important temple hindouiste de l’Asie du sud-est. L’ensemble a été construit eu IX siècle, mais a subi de nombreux dommages suites aux éruptions volcanique du Mérapi, si bien que quasiment tout fut démonté puis reconstruit pierre à pierre pour prendre la forme actuelle.

Pendant que nous photographions les bas-reliefs, les temples de Brama, de Civa les touristes, en grande majorité indonésiens nous prennent en photo nous ! A notre grande surprise ils nous demandent de poser avec eux à tour de rôle pour immortaliser nos rencontres. A croire que notre présence est d’une grande importance !


 

Dans le parc ou nous sommes, des hauts parleurs en haut des arbres diffusent un peu de cette musique indonésienne qui ne ressemble à aucune autre, le gamelan… Souvenirs de Bali…

 La route nous attend pour un autre site classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Une cinquantaine de kilomètres nous mènent à Borobudur, le plus grand sanctuaire bouddhiste du monde. Dans la voiture, nous tremblons. Les indonésiens roulent à tombeau ouvert. Comme les vietnamiens, mais roulant à gauche. Terrible.

 
 
 
 

Dans les villages...


24 avril

 
 Pas simple de rouler à gauche de naviguer dans  un trafic animé par des véhicules aux vitesses aussi irrégulières qu’en Indonésie, le tout avec des indications à repérer dans un paysage urbain inconnu. Sur une carte, nous avons vaguement convenu d’un itinéraire pour visiter les alentours de Yogyakarta, trouver des villages d’artisans travaillant sur le bois. Direction plein sud vers la mer, très vite la route traverse de belles rizières, nous nous égarons un peu demandons notre chemin revenons en arrière, prenons au hasard une petite route pour surgir sur une place d’un petit village où il y a un marché. Des dizaines de vendeurs d’oiseaux de poissons, une vendeuse avec une belle balance propose du tabac au kilogramme. Un type pédale sur une bicyclette pour animer un petit manège où montent et descendent comme des bouchons sur la mer quatre petites montures mécaniques où animalières.




 Puis de nouveaux les rizières, les routes où le paddy sèche sur de grandes nattes, et le besoin de demander à plusieurs reprises notre chemin pour atteindre le village des sculpteurs sur bois. Les ateliers sont assez espacés et finalement ce qui pouvait se présenter comme un village un peu touristique, est plutôt désert. Dans un atelier, nous faisons l’acquisition à bon prix de quelques pièces décoratives. Nous tournons dans le dit village, qui est sur une petite colline boisée, puis allons manger sur le bord de la route sur les bancs en bois d’une petite roulotte. Sans vraiment savoir ce que nous avons commandé, on grignote quelques galettes de riz soufflé et buvant une infusion citronnées servie dans des choppes en plastiques remplies de glaçons à ras bord, comme une promesse de maux de ventre à venir. Un bon bol de soupe au riz et aux légumes arrive. On ne pouvait attendre mieux au niveau de la qualité ! Le tout nous coutera 20 000 roupies, soit moins de 2 euros. Pas de maux de ventre finalement, plutôt mal au dos, suite aux nombreux kilomètres parcourus en moto. Le soir venu, nous profitons de véhicule pour faire un tour d’un autre quartier assez touristique, Prariwotaran. A l’apéritif, nous commandons une vodka, mais il n’y en a pas. Je me rabats sur un Green Sand, sorte de Canada dry citronné, un soda qui a la particularité de ne pas bénéficier de la mention halal, il contient 0,5 gr d’alcool.
 
 
 

Visite de "Djodja"


Mardi 23

On se lance dans le vif du sujet. Premièrement la visite du palais du Sultan. Il faut marcher un peu. Notre hôtel et du côté d’un monument très symbolique le Sugu. Il faut donc remonter tout Malioboro pour arriver au palais. Nous sommes abordés lors d’une petite pause pour consulter notre carte par un petit groupe de collégiennes voilées qui doivent apparemment faire un reportage en interviewant des touristes pour apprendre à communiquer en anglais. Remarque, en passant, beaucoup de collégienne ou lycéennes sont voilées, ce qui tend à contredire le fait que les voile est interdit à l’école, ou du moins que les écoles publiques sont de plus en plus délaissées. Bon, elles sont quand même toutes gentilles, nous posent des questions sur la France, sur les spécialités culinaires que l’on a goutées en Indonésie. Nous venons d’arriver c’est un peu difficile, je leur case mon Nasi Goreng que j’ai mangé la veille, cela les amuse beaucoup (j’aurais dû leur parler du verre d’arak). Quelques commentaires sont demandés sur ce que nous pensons des indonésiens - que du bien évidemment- on ne va pas en dire du mal, tout depuis notre arrivée semble facile et l’accueil est toujours bienveillant. Les rues sont animées mais les gens plutôt calme, il y a une circulation assez intense de deux roues, de bekaks, ces cyclo-pousses locaux, qui ont l’air très utilisés pour les gens un peu fatigués de marcher en plein soleil et puis quelques petites diligences tractées par des chevaux nains (ou poneys… Je n’ai pas l’expertise requise pour distinguer la nuance). A part ça elles nous demandent dans quels pays nous avons déjà voyagé, Cambodge, Malaisie, France et Italie pour donner un aperçu sans trop en faire, même si c’est déjà trop pour ces jeunes filles qui ne pourront peut-être pas avoir la chance de voyager

Nous sommes pris en photos par nos jeunes filles et repartons pour le palais du Sultan. C’est là le grand terrain en herbe vu depuis l’avion on y est, c’était donc la place devant le palais !

Nous sortons quelques billets un guide nous fait l’honneur de nous accompagner en précisant que son service est prévu dans le prix du ticket ? Bien… Le palais date de 756. Le sultan ne joue aujourd’hui qu’un rôle symbolique, mais joui encore d’un certain prestige. Parler de Palais est un peu tiré par les cheveux. Nous ne voyons que deux halles vides ou se déroulent des cérémonies assez espacées dans l’année. Quelques vitrines présentent des mannequins en tenue de fête et puis c’est tout… Nous continuons donc à pied dans les rues voisines autour du palais. Des petit ateliers de batiks ici ou là égaient des ruelles calmes. Nous voici au marché aux oiseaux puis au Water palace, que nous rejoignons en passant dans des passages souterrains suivant des touristes apparemment bien informés.
 





Le Water palace daté lui aussi de 8ème siècle et un très bel édifice renfermant des piscines pour le sultan, sa famille, ses maîtresses. Là encore un type nous accompagne en prenant notre ticket d’entrée, bientôt rejoint par une jeune étudiante voilée qui veut parler avec nous pour améliorer son anglais.

Ensemble, nous nous promenons dans le quartier, dans des petites rues fleuries et calmes, puis visitons la mosquée souterraine. Rien à l’intérieur ne nous fait penser que nous sommes dans une mosquée à part une minuscule niche orientée vers la Mecque. L’édifice est une rotonde sur deux étages éclairé en son centre par un puits de lumière traversé par un escalier permettent de passer d’un étage à l’autre. Les murs sont nus, on pourrait se croire dans un petit cloitre.

Nous remercions nous guides, et après une pause dans un petit café face au marché aux oiseaux, nous marchons un peu encore avant de prendre un bekak pour revenir vers Malioboro et ses agences. Nous devons organiser nos visites à Prambanan et Borobudur. Un orage éclate, heureusement, les arcades de Malioboro permettent de nous tenir au sec en faisant le tour des boutiques, qui se ressemblent beaucoup avec les mêmes T-Shirts, vêtements en batik, et affreux maillots de foot d’équipes anglaises ou espagnoles. Pour les maillots du PSG, il faudra encore attendre… Quelques boutiques retiennent notre attention avec des objets de décoration.

Remarque en passant : il n’y a pas de 7-Eleven, mais de nombreux combini Indomaret, ce qui revient au même mais qui fait plus couleur locale. Une boisson star un peu surprenante, le Pocari sweat, normalement pour les sportifs après l’effort, au milieu des sodas multicolores dont un étonnant Fanta « stroberi ». Curieux également dans ces boutiques, les nombreux médicaments en libre-service, au milieu des sucreries les plus toxiques pour la santé, et des cigarettes dont les fameuses Kretek aux filtres sucrés, aromatisés aux clous de girofles. Pas d’alcool en revanche, la Bintang –bière locale- étant l’exception qui confirme la règle.

 

Dans une petite agence, nous louons une moto pour le lendemain et réservons une voiture pour visiter Prambanan et, dans la foulée nous conduire à Borobudur où nous dormirons deux nuits.

Yogyakarta, Java.


21 avril 2013

Arrivée à Java au terme d’un voyage avec escale à Kuala Lumpur. Quelques secondes avant l’atterrissage des rizières sont aperçues au sol,  tracées au cordeau, puis la ville, de plus en plus dense, avec un grand carré d’herbe au milieu des maisons, comme un terrain de foot, avec deux grands arbres. Mon voisin qui est près du hublot se redresse avec intérêt, il semble bien reconnaître un endroit qui lui est familier.

En descendant de l’avion, c’est le Merapi, un volcan qui ne dort que d’un œil, qui domine le paysage.


“Where are you from ? Français ? Sans déconner ? »
C’est ainsi que nous sommes accueillis pas le premier rabatteur devant une boutique de batik, après l’installation à l’hôtel et notre arrivée sur Malioboro, l’artère animée de centre-ville, Avec sa façon familière de nous aborder, cette première rencontre nous semble sympathique, quoique intéressée. Faisant nos premiers pas dans Yogyakarta, il était un peu prématuré de nous énerver et nous laissons le type dérouler son baratin. Son français est beaucoup moins bon que son « sans déconner » ne nous laissait paraître. Il enchaine en anglais avec une histoire d’exposition de batik qui a lieu jusqu’à ce soir et qui se poursuivra le lendemain à Jakarta. Nous avons vraiment de la chance de pouvoir arriver à temps pour la voir, et, en plus, c’est à tout juste 25 mètres. Le type nous accompagne, c’est juste là-bas, ajoutant encore « sans déconner ! »(*)… Inutile de préciser que ce n’était pas du tout à 25 mètres, qu’il a tout fait pour nous éviter de regarder dans les autres boutiques et que son histoire allait se finir dans un pseudo atelier, qui était une boutique où la porte s’est renfermée derrière nous comme dans un piège. Un artiste nous reçoit, le rabatteur s’en va, on ne le reverra plus. Nous regardons poliment les batiks, sans avoir à aucun moment la moindre velléité d’achat. Nous quittons le lieu en moins de 3 minutes. Finalement, on ne nous a pas trop forcés à la consommation, mais nos premiers pas ressemblaient de façon caricaturale aux descriptions des guides. Libérés, nous pouvons enfin poser notre regard sur « Jodja », ses rues, son animation, ses symboles…



Et puis, après un petit tour sur Malioboro, nous nous engageons sur Sosro une rue qui lui est perpendiculaire, le cœur d’un petit quartier routard avec ses hôtels, ses pensions, appelées ici losemen. Sur Sosro, les avions grondent à basse altitudes au-dessus de nos têtes en se préparant  à atterrir, l’aéroport n’étant pas bien loin (8 km)…

A vrai dire, il n’y a pas une folle ambiance, les petits restaurants ne sont pas bien remplis, on se pose dans le plus animé. On se commande un verre d’arak et consultons les excursions possibles en faisant notre petit programme pour la semaine. Deux jours à Djodja avec excursion à Prambanan, deux jours à Borobudur et deux jours à Solo ? Le Merapi ? Non, il faut être raisonnable, on va galérer et puis, justement il se met à flotter sévèrement. La météo pour le Merapi ne va pas être favorable. Pas une folle envie de se lancer dans une grande randonnée…
 

 
(*)Une rencontre ultérieure avec un moto-taxi m’apprendra les locutions françaises en vogue en Indonésie : "Sans déconner", "cool Raoul", "ça roule ma poule", "c’est parti mon kiki."

 

samedi 28 décembre 2013

En sens inverse !



Avec Khmer Boléro, Do Kh. (Dô Khiem), nous conduit sur la route qui fait le chemin contraire de celui j'ai décrit, de la Thaïlande au Vietnam. Avec ses personnages (Nam et Kim, deux viet kieus accompagné de Phailin, une jeune thaïe) il fait escale à Pattaya, à Angkor, Phom Penh... Sur la route ces derniers rencontrent et invitent à leur périple une jeune Ukrainienne venue pour un mariage arrangé (mais dont le mari a semble-t-il fait faux bond) et un footballeur Burkinabé qui lui-même s’est pris d’affection pour une adolescente vietnamienne de 14 ans…
Extrait choisi :

Au Therma’s, l’on devinait encore le bleu des uniformes de travail qui venait de laisser place au calicot bon marché provenant du Laos, des imitations Made in China si évidentes que, parfois, la marque, de luxe comme il se doit, était épelée à l’envers, Sadida au lieu d’Adidas.
Nam avait eu l’occasion de faire cette expérience de visu. La culotte de fantaisie d’une demoiselle de mauvaise compagnie l’avait intriguée. Elle portait sur le devant le dessin d’une main ouverte avec la paume dirigée vers l’extérieur, convention commune et internationale du geste « Halte » mais inexplicablement l’inscription qui accompagnait ce signe interdit était « POTS » !

Entre la Thaïlande houellebecquienne et le Vietnam de Nguyen Huy Thiep, (« A nos vingt ans »)  Do Kh., avec un regard acerbe et un humour puissant, réussit l’amalgame entre cette condescendance dure et cette nostalgie douce propre aux viet kieus, à leurs déracinements.
 
 
4ème de couverture :
Anciens amants à Paris, Kim et Nam se retrouvent par hasard à Bangkok au moment du Songkran, la fête qui célèbre l'arrivée de la saison des pluies. Le couple tente de renouer, par les paroles autant que par les caresses, mais la mousson se fait désirer. Ils décident de partir à sa rencontre, vers l'Est, qui est aussi la direction de leur pays d'origine : le Vietnam. En compagnie de Phailin, une jeune fille de la haute société thaï, s'engage alors un road-trip à travers le nouveau Cambodge, au gré des rencontres et au rythme des boléros asiatiques, qui s'achève à Bavet, poste frontière piqué de casinos et de karaoké improbables. Et la météo reste capricieuse... Humour cru et amour sexe, voyage et exil forment ici un cocktail détonant.

 

samedi 16 novembre 2013

La route pour Kampot


Vendredi 25/11/2013

De Saigon, je prends le premier bus pour le Cambodge. Un objectif sportif justifie mon déplacement : je me suis inscrit au premier semi-marathon qui doit avoir lieu sur le plateau du Bokor le dimanche 27/11/2013…

Deux heures de route : la frontière, les casinos glauques. Deux heures encore et c’est la traversée du Mékong avec ses vendeurs d’insectes, de coquillages, d’œufs de cailles ; les voyageurs sont de bons clients, ils sortent leurs billets. De mon côté, j’ai plutôt des hauts- le-cœur. Le bac est emprunté par les deux roues chargés de cochons et de volailles vivantes et  les véhicules bourrés à craquer de tout et n’importe quoi… A chacun de mes passages sur cette route, ces scènes insolites m’ont marquées. Les nomades assis en groupes sur les toits des mini vans semblent toutefois en voie de disparition…


 Phnom Penh, enfin… Changement de bus… Une route sublime, des rizières d’un vert luminescent, des îlots de palmiers et des maisons sur pilotis aux couleurs vives.


Puis, un grand rond-point, avec, en son centre, un durian géant : c’est l’arrivée à Kampot au terme d’une une dizaine d’heures de route.


Je trouve assez facilement une guest house pas chère et parcours les quais, avec un vélo emprunté pour une petite heure, retrouvant un peu mes marques par rapport à ma venue précédente. Je m’arrête devant une fête foraine, devant une fête de mariage. Je dine de quelques brochettes devant le marché en devisant intérieurement sur les ressemblances entre Kampot et Battambang…

 
 
 
 
 

Kep


Samedi 26/11/2013

Le jour se lève sous une averse. Je loue une moto et achète une cape de pluie pour prendre la direction de Kep, via les marais salants. La saison ne se prête pas à la collecte du sel, les bassins sont vides, mais quelques travailleuses s’activent à l’entretien des marais. Je traverse quelques villages, chams, si l’on se fie à la présence des mosquées à la pratique méticuleuse de l’islam des femmes. Elles sont  quasiment toutes voilées, leurs fillettes aussi. Passons. Par une piste, je me rends vers la grotte de Phnom Chhnork. Le soleil, perçant, dévoile dans le paysage de nouvelles couleurs, de nouveaux contrastes. Un guide m’invite à le suivre dans une grotte qui n’est pas celle que je voulais visiter, mais malin, il ne me le fait savoir que plus tard… La visite vaut néanmoins le coup, elle est un peu sportive, il faut ramper, escalader des parois humides, ce que ce jeune homme parvient parfaitement à faire en tongs, moi, plus fastidieusement… Nous visitons ensuite la vraie grotte de Phnom Chhrnork à l’intérieur de laquelle un petit temple pré angkorien a été érigé, parfaitement conservé. Dans la grotte, le jeune homme me montre dans les stalactites des queues de crocodiles, des têtes d’éléphants, ou de lions, des corps de femmes… Dehors, les hommes du village sont réunis pour regarder un match de boxe dans un petit restaurant avec chaises en plastiques, les bières sont posées sur la table, des Angkor Beer.


 


 Contre toute attente, la route vers Kep qui était en bon état est revenue à un état de piste poussiéreuse, probablement dans l’optique d’un élargissement. En arrivant, la carcasse de l’ancien lycée semble avoir disparu. Plus loin, l’une des anciennes maisons -criblée de balles-de Sihanouk, telle une ambassade, est entourée d’une muraille. De nombreux baigneurs barbotent à la plage qui fait face au marché aux crabes ; les vendeurs des sodas haranguent les promeneurs avec leurs boissons aux couleurs acidulées… Petite ambiance balnéaire bien agréable. Après une pause, je circule dans les allées aux villas cossues qui témoignent  encore de l’âge d’or de cette station au début du siècle. Aujourd’hui, elles sont abandonnées aux vaches, aux varans et à leur photogénie. Les branches d’arbres sortent par les fenêtres comme dans des temples khmers.





De retour à Kampot, je croise, courant à la tombée de la nuit deux coureurs bien affutés. Cela tombe bien, car je ne sais toujours pas au juste à quelle heure commencera le semi-marathon du Bokor auquel je me suis inscrit pour le lendemain. Les interrogeant, ils me disent qu’ils participeront, eux aussi, et que le départ est à 6 heures du matin. Curieux… ça fait vraiment très tôt. Il faudrait que je me lève au moins à 4 heures. Je les laisse courir à leur bon rythme sans insister. Je me demande au passage s’ils ont vraiment raison de courir ainsi, la veille au soir. Je ne savais pas encore à qui je venais de parler !

Par chance une affiche faisant la promotion de l’événement donnait deux numéros de téléphone que j’appelais. On m’apprit dit que le départ était prévu à 7h35. Pas 7h30, non ! 7h35 ! Précision étonnante que je fis répéter. Il me fallait néanmoins partir tôt, le plateau étant à une quarantaine de kilomètre et 1000 mètres d’altitude.

 

Sur le Bokor


Dimanche 27/11/2013

5h. Réveil et  réveil du gardien qui, au rez de chaussée, doit m’ouvrir. Pleine nuit, pleins phares, c’est parti pour le Bokor ! Au bout de 10 km, au pied de l’ascension, me voici rejoint par 4 motards, dont certains portent des vestes de survêtement « Cambodia ». Je les suis dans le brouillard de plus en plus épais, bien content d’avoir pensé à enfiler mon poncho « sac poubelle ». La lumière s’éclaircit, mais mon niveau d’essence, décline de façon inquiétante dans cette montée. Dans le rouge, j’accélère, ce qui est absurde puisque cela me fait consommer plus. Il reste encore plus de 20 km à faire…  Finalement, au lever du jour, nous arrivons au Thansur Bokor Hotel & Casino qui organise cette course. Je retire mon dossard, une puce est prévue pour le chronométrage ; l’événement semble bien préparé !

En attendant le départ, je fais un petit tour dans le lobby du casino-hôtel, bien kitsch, digne de Macao. A 7 heures, les parieurs sont déjà sur les tables de jeux, dans une ambiance sordide où les croupières en talons aiguille portent des minijupes si courtes qu’elles marchent les mains croisées sur les fesses pour faire écran ! Au milieu de la principale salle de jeu, sur la moquette rouge, une Honda est à gagner !

7h30. Les coureurs se pressent sur la ligne de départ. Je jauge le niveau des autres compétiteurs à leurs tenues, leurs chaussures, aux galbes de leurs jambes. Nous sommes une bonne quarantaine, avec une bonne moitié de cambodgiens qui ne savent peut-être pas trop dans quelle galère ils se sont embarqués : bermuda, chemisette burberry’s, pieds nus dans leurs chaussures à semelles de 5 mm pour les uns, tenue de foot et crampons moulés pour d’autres, sans parler de ceux qui se présentent sans chaussures !

Tout le monde est chaud, les organisateurs avaient organisé un échauffement en improvisant une piste de danse et en mettant Gangnam style à fond ; ambiance garantie !

3, 2, 1 c’est parti ! Les plus mal chaussés se jettent avec furie aux avant-postes, confirmant à mes yeux leur manque de lucidité sur l’effort à fournir. Je les rattrape et les laisse derrière moi au 3ème kilomètre. Je boucle finalement mon affaire en 1h 45, finissant 11ème. Les deux premiers sont justement les deux cambodgiens croisés hier. Ils décrochent la même médaille que moi, en plus grosse. Le nom du vainqueur : Hem Bunting. Un champion aguerri qui participa à deux championnats du monde d’athlétisme et qui fut le porte-drapeau de la délégation cambodgienne aux Jeux Olympiques de Pékin, où il disputa le marathon ! La classe mondiale quoi !

 

  
 


Suite du programme sur le Bokor après la course : la visite de la vieille église, aperçue sur le parcours du semi-marathon. Au milieu des éléments minéraux et de la végétation, elle ressemble à une petite église de Toscane. Sur un promontoire, un improbable groupe venu d’on ne sait où chante des airs negro spiritual. Autour d’eux, le brouillard épais fait écran au panorama sur forêt en contre bas.


Non loin de là, l’épave du Bokor Palace impose sa silhouette art déco. Par rapport aux photos que je lui connaissais, il a été gratté et enduit. Il ressemble désormais à un chantier interrompu par la crise économique. Son pouvoir d’évocation a perdu en force, c’est dommage.

Après un repas bien mérité au buffet du Thansur Hotel-Casino, pour 9$, ce qui n’est pas cher mais qui ne vaut pas plus, j’entreprends le retour vers Kampot inquiet à propos de mon niveau d’essence, n’ayant pas aperçu de station-service proche. Je rentre, contrarié au point de descendre les côtes en coupant le moteur jusqu’au monumental Bouddha  situé à 10km en contrebas et au pied duquel des vendeuses me fourniront, à un prix exorbitant, 1L d’essence conditionnée, comme le veut la tradition, dans une bouteille d’episcopal.

Je vagabonde alors autour de quelques villas proches abandonnées, dont l’une aurait appartenu, encore une fois, à Sihanouk. Avec leurs terrasses panoramiques elles ont un petit air méditerranéen quand chantent, comme c’est les cas ce jour-là, les cigales, au milieu de la pinède et des cactus !

Le cerveau bien oxygéné, je repars euphorique regrettant presque d’avoir trouvé de l’essence - ma curiosité n’étant plus piquée de savoir si j’avais pu descendre le plateau et atteindre la station Sokimex au pied du Bokor sans avoir à pousser la moto !
 
 

Phnom Penh


Lundi 28/11/2013

Par un bus de la compagnie Sorya, je retourne à Phnom Penh. Peu scrupuleux de l’itinéraire, je me rends assez vite compte que le bus fera un détour par Kep avant de prendre la direction de la capitale. En soi, ce n’est pas bien grave malgré les travaux sur la route. Ce que j’ignorais, c’était que la réfection de la route, réduite à l’état de piste poussiéreuse, s’étendrait sur plus de 100km. Durée de la balade : 5 heures…


Arrivé sur les coups de 14h à Phnom Penh et après installation à l’hôtel réservé la veille, je négociais la location d’un scooter pour effectuer une visite qui me tenait à cœur dans ce séjour. Si le Cambodge m’avais la première fois laissé un souvenir douloureux, et au fond déplu, j’ai souvent éprouvé un désir d’y retourner, comme si j’avais moi-même un doute sur les raisons de cette désaffection ; un besoin de mieux cerner ce pays. La lecture récente de la biographie de Sihanouk par Jean Marie Cambacérès, la lecture du Portail de François Bizot (après 5 ans de procrastination), après celle de Kampuchéa de Philippe Deville, m’ont décidé à faire un pas de plus, un peu plus éclairé. Tous ces ouvrages, brillants, documentés et sincères détaillent les rouages, les caractères des protagonistes des années noires. Je voulu donc me rendre au centre de détention S21, Tuol Sleng, le musée du génocide cambodgien, cet ancien lycée, dans lequel furent détenus, interrogés et torturés sous la direction de Douch près de 13000 prisonniers. Je ne m’étais jamais, lors de mes précédents venues, décidé à visité ce lieu de mémoire, craignant ce par quoi je fus frappé dès mon entrée : un profond malaise. Les salles d’interrogatoires, les lits, les chaines, les potences, la lecture du règlement… C’est terrible… Puis ce sont les photos : la joie des citadins, puis la peur, les gamins sortis des foret avec leur kalachnikovs, qui prennent le contrôle de tout, les marches forcées, les travaux forcés, pendant que Pol Pot et ses acolytes posent cyniquement devant leur Mercedes noire, bien utile, pour ceux-là même qui érigeaient ce type de bien comme facteur de dépravation.  Des photos encore, par centaines, les visages de prisonniers de S21, les répliques de leur biographies qu’ils devaient rédiger. Les représentations par les  survivants des scènes de tortures, la vision insoutenable des cellules…

  


Plus tard passant devant le monument de l’indépendance. Je découvre alors une nouveauté : une statue monumentale de Sihanouk. Une façon de sceller la fin des décennies marquée par celui qui a garanti l’indépendance du Cambodge tout en le métastasant ?

 

Tournant dans la ville, en fin d’après-midi autour de l’ambassade de France, du Wat Phnom, du Raffles, de la poste centrale, je pose un œil observateur sur la nouvelle tour Vattanac, en forme de dragon, le nouveau centre financier de Phnom Penh qui devait être inauguré en 2012. Hélas, j’ai bien l’impression que les travaux n’ont pas avancé beaucoup depuis ma dernière venue !

La nuit tombe enfin, la ville dépourvue d’éclairage public devient ténébreuse, je rends la moto pour déambuler sur le quai Sisowat, haut en couleur, avec ses cours de danses rythmés par une musique très Tunning , ses matchs de foot improvisés et ses vendeurs d’insectes grillés…